Famille Eschbach
du Neuhof
Souche ESCHBACH
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01 novembre 2008
Dans le cadre de ce blog, je pense qu’il est intéressant de revenir sur le témoignage d’une cousine qui, par la force au destin, a vécu la majeure partie de sa vie hors de notre belle Alsace.
Madeleine Guyonnet était la fille de Joseph Ernest Ehret et de Emma Marguerite Eschbach . Elle nous a quittée il y a quelques années de cela. Une particularité unique dans la famille lui vaut, avec ses frères et sœurs, de descendre de Joseph, leur trisaïeul, à la fois par leur père et leur mère. En effet leurs bisaïeuls, Marie-Catherine Eschbach mariée avec Laurent Ehret et Michel Eschbach, époux de Marie-Marguerite Becker, étaient frères et sœurs. Madeleine habitait, jusqu’à son décès dans les années 2000, à Panazole dans la proximité de Limoges.
Je lui laisse le soin de vous présenter sa famille.
Notre cousin Jean Louis Eschbach m’a demandé de vous parler de ma famille qui est native du Neuhof . Je sais que très récemment vous vous êtes tous rassemblés et j’aurais tant voulu être au milieu de vous tous! Cette réunion fut, d’après ce qu’on m’a rapporté, une réussite. Je fais régulièrement, au mois de mai-juin, un voyage en Alsace. Malheureusement, cette année (1987), un empêchement dû à des raisons de santé de mon mari, m’a privé à la fois de mon retour aux sources et de ma participation à notre rassemblement. J’espère de tout cœur venir vous rendre visite au printemps prochain car, vous le savez bien, j’habite dans le Limousin. C’est tout ce même un petit voyage! Je suis tenue au courant de tout par Jean Louis qui se donne beaucoup de mal pour toute la famille Eschbach, et également par mes frères, belles-sœurs et neveux qui ont pu assister à la fête. Cela m’aurais fait très plaisir de revoir des cousins perdus de vue depuis mon enfance.
Il faut que je vous dise que je suis la fille de Ernest Ehret et de Marguerite Eschbach de la rue de la Redoute au Neuhof . Je suis née route d’Altenheim mais je ne peux vous raconter grand-chose de ma tendre jeunesse car j’ai quitté le Neuhof à l’âge de sept ans et demi, avec mes parents et mes frères. Je ne suis revenue en Alsace qu’à la mort de mon père en 1932, j’avais donc 12 ans. Cette année-là maman est allée rejoindre ses parents « Eschbach« qui s’étaient retirés à Ostwald.
C’est là que la guerre nous a trouvé. Il y avait également à Ostwald, à ce moment-là, mon oncle Edouard Eschbach qui ressemblait beaucoup à mon grand-père Philippe. Il est décédé et ses fils Léon et Fernand également. Il reste une fille, Emma, mais j’ai perdu tout contact avec elle et je ne sais pas où elle se trouve actuellement.
Ce n’est un secret pour personne que mon grand-père et mon oncle Edouard aimaient tous les deux beaucoup la pêche et la chasse ! même sans fusil !!! Ils avaient aussi, tous les deux, des secrets et des coins pour trouver les fameuses morilles bien de chez nous; dans la forêt au Neuhof bien sûr !
Mon grand-père Philippe a travaillé à l’Arsenal de Strasbourg et je crois qu’il a été pensionné très jeune. Je me souviens qu’il avait une admiration pour l’Empereur Napoléon 1er . Il avait chez lui beaucoup de statuettes rappelant cette époque, notamment Bonaparte à cheval sur sa table de nuit. Il portait, également toujours, sur sa cravate, un aigle en argent.
Maman était d’une famille assez nombreuse et je pense qu’à l’époque cela devait être assez dur d’élever beaucoup d’enfants. Pour ma part, j’ai connu sept oncles et tantes vivants, les autres ont dû mourir en bas âge. Mais ils devaient être à dix en tout. Il y avait Léon, Edouard , Mathilde, Philippine, Marguerite (ma maman), Emile et Josephine la plus jeune qui est décédée en 1984 à 83 ans chez sa fille Marguerite, Chacun de mes oncles; tantes et Maman avaient un métier ce qui était pour l’époque déjà fort bien.
La guerre nous a tous séparés, hélas !. J’ai fait la connaissance de mon mari qui était Lieutenant dans un régiment d`artillerie lourde cantonné pendant la « drole de guerre » à Ostwald. Pour aller le rejoindre dans le centre, en zone libre » j’ai dû opter pour la France, ce que j’ai du reste fait volontairement et avec plaisir. Il n’y avait pas d’autre issue car; tout le monde le sait, les Allemands, dès leur arrivée en Alsace, nous ont tout simplement considéré comme étant des leurs et nous ont tout de suite annexés.
Ce fut dur à 20 ans de tout quitter avec presque rien une valise, le prix du billet et encore heureuse qu’on ait bien voulu me laisser partir. J’ai quand même attendu deux mois pour obtenir mes papiers d’expulsion. Je suis partie le 1er octobre 1940. Le voyage fut assez mouvementé. Il y a eu le traversée de Paris et le passage en zone libre, mais en fin de compte tout s’est bien passé pour moi.
Pour ma pauvre Maman cela fut évidemment pénible et nous ne savions pas à ce moment que nous ce nous reverrions que cinq années plus tard. Nous fûmes rapidement privés de correspondance et ainsi totalement privés de nouvelles les uns des autres. Mon mari a tout de même réussi, avec énormément de difficultés, à avoir des nouvelles en passant par la Suisse. Toutes les lettres étaient ouvertes et censurées bien sûr! Nous ne pouvions pas nous dire grand chose et elle mettaient très longtemps à arriver à destination. J’ai tout de même su, par ce stratagème, que mes frères aussi étaient égaiement partis …mais pas dans la même direction que moi!
Mon frère aîné Alfred, a été arrêté après avoir été d’abord prisonnier de guerre. Il était sous-officier dans l’armée française et avait été relâché, pour être repris et emmené à Schirmeck au camp de rééducation jusqu’à la fin de la guerre. Mon petit frère Paul fut enrôlé de force dans l’armée allemande afin d’aller combattre en Russie. Cela fut tragique pour tous les ceux et ils ont bien sûr, énormément souffert. Toutes ces tristes nouvelles nous ont naturellement inquiétés et attristés. Mais que faire, nous étions impuissants. L’Alsace était devenue zone interdite et nous nous trouvions en zone libre, mais tout de même sous contrôle allemand.
Nous avons pu nous marier à Périgueux où j’étais en pension dans une famille strasbourgeoise réfugiée là-bas, en attendant nos papiers. Mon mari, lui, se trouvait dans l’armée de l’armistice à Limoges. J’étais mineure à l’époque et il me fut très difficile d’obtenir mes papiers vu le manque de communication. Mais avec la complicité des autorités militaires et de l’adjoint au maire de Strasbourg qui était encore détaché à Périgueux, il nous fut possible de convoler le 15 Décembre 1940.
Pour Maman, cette époque fût terrible car elle était seule et avait encore mon petit-frère Antoine et ma petite soeur Yvonne à élever. Je n’ai pu retourner en Alsace, pour revoir ma famille, qu’en 1945 dès que les communications furent rétablies. Maman a enfin pu faire connaissance avec notre fille aînée née en octobre 1942 et que nous avions appelé Marie-Odile. Je ne vous décrirai pas les larmes de joie qui furent versées lors de nos retrouvailles.. dans notre belle Alsace, si meurtrie, mais enfin retrouvée. Mais la joie était quand même tempérée par la peine de se retrouver, tous; marqués par les privations et les souffrances.
Pour effacer le souvenir de l’esclavage dans l’armée allemande, mon frère Paul, à peine rentré depuis deux mois de la guerre, est reparti avec nous pour s’engager de suite, pour trois ans, volontairement dans l’armée française ». Ce qui correspond à la ligne de conduite dans notre famille.
Madeleine Guyonnet
(courrier de 1987)